Par Muhindo Katsurana Jules

Symbole de la solidarité et de la philanthropie, Sœur Angélique Namaika aide depuis 2008, les femmes les plus vulnérables via son organisation humanitaire, le Centre de réintégration et de développement (CRAD). Un bel exemple à suivre pour le bien- être et l’avenir de la femme quel que soit sa couleur ou ses origines ; ce qui lui a valu en 2013, le plus grand prix de l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés (prix Nansen, 100000$) pour son fort engagement dans l'encadrement des femmes et filles déplacées.



photo 09Angélique Namaika est une religieuse catholique de l'ordre des Sœurs Augustines du diocèse de Dungu-Doruma situé dans le nord-est de la République Démocratique du Congo dans la province orientale, à la frontière avec le Soudan et dans une moindre mesure avec la République Centre Africaine. Il faut noter que les religieuses de cette congrégation se dévouent à des œuvres dans le domaine sanitaire, éducatif et pastoral. 
Sœur Namaika  est née dans le village de Kembisa, dans le sud de la Province-Orientale et a grandi dans une famille de six enfants que les parents, cultivateurs (propriétaires d’une petite plantation de café), ont tenu à envoyer à l’école. Elle vit actuellement dans le Haut Uélé, à l’Est du pays, dans  la partie qui a été victime des atrocités de la LRA (lord's resistance army) une rébellion ougandaise. Le district du Haut-Uélé a connu au cours du mois de mai une augmentation de 7 100 personnes déplacées. Ce qui porte le total à 198 011 le nombre de personnes déplacées dans le district. Ce surplus a été enregistré uniquement dans le territoire de Dungu.

 


 
Entre le 14 et 17 décembre 2009,  le LRA, un groupe rebelle ougandais, a mené une attaque meurtrière dans la région de Makombo située dans le district du Haut Uélé, près de la frontière avec le Soudan, tuant au cours d’une opération bien planifiée, plus de 321 civils et enlevant plus de 250 autres personnes, dont au moins 80 enfants. Cette attaque a provoqué l’un des plus importants massacres en 23 ans d’histoire de la LRA. Des écoliers ont été enlevés et enrôlés, des femmes et filles enlevées et violées, des villages entiers incendiés  et des milliers de personnes déplacées dans les grandes villes, à l’instar de Dungu où 12 camps ont été spontanément créés.
Ainsi, avant l’arrivée des organisations humanitaires, cette femme de cœur, pétrie de volonté  a commencé à assister des enfants non accompagnés et/ou séparés de leurs parents.

 





Son « Centre de Réinsertion et d’Appui au Développement » deviendra ainsi le cadre par excellence où les acteurs humanitaires (COOPI, Oxfam, imageSave The children, CARITAS, etc) vont s’atteler à la réinsertion socio-économique des personnes déplacées.  Par son travail, Sœur Angélique Namaika démontre à plus d’un titre qu’une personne seule peut changer la vie des dizaines ou des milliers de familles. En effet, sensible au problème des


déplacés, elle a pris des dispositions pour assurer un encadrement viable à ces êtres en quête de survie et d’amour : elle les alphabétise, leur enseigne la couture, la pâtisserie. Fort de ses convictions religieuses et des grandes doctrines de mansuétude, elle ne donnera pas que du poisson mais leur apprendra à pêcher. S’appuyant sur le principe divin « Tu mangeras le pain à la sueur de ton front », elle les encourage à cultiver les champs communautaires, où poussent des haricots, du maïs, du riz, des courges, des bananes, les intégrant ainsi  dans la vie économique locale « J’ai travaillé avec un groupe de femmes vulnérables qui ne savaient ni lire ni écrire, qui n’avaient pas de travail », se souvient-elle. 
Le Centre pour la réintégration et le développement de Dungu, animé par la religieuse, a changé la vie de plus de 2.000 femmes et jeunes filles qui avaient été brutalisées et violées principalement par la LRA et contraintes de s’enfuir. Elle n’a jamais cessé de faire tout son possible pour redonner espoir et vie à ces milliers de personnes vulnérables.  Elle a créé une boulangerie semi-industrielle à caractère social, qui produit du pain et le donne aux femmes sous forme de prêt.  De nombreuses femmes ont ainsi pu créer leur petite unité de commercialisation de pain. Sœur Angélique les aide à retrouver l’estime de soi en leur apprenant un métier, en leur apprenant à lire et à écrire, en leur trouvant un emploi, en leur offrant un abri et en leur montrant que quelqu’un se soucie d’elles.
Sœur Angélique souligne qu’éduquer une femme, c'est éduquer la nation tout entière, car ce sont les femmes qui éduquent les enfants. Une bonne perspective pour les politiques à mettre en œuvre par les dirigeants ou mieux les gouvernants pour assurer l’émergence des peuples encore en proie au sous-développement. Son action prouve si besoin était encore de le démontrer que la femme est un élément vital dans tout processus de développement économique, social, politique et culturel. Elle est l’élément vital de tout mécanisme de reconstruction dont le cas de la RCA en est une parfaite illustration.
Sœur Angélique a la ferme assurance que chaque personne possède des capacités et moyens pour venir en aide aux nécessiteux, et que le découragement dans l’assistance vient de l’ignorance des moyens énormes dont on dispose. A cet effet, elle « invite toutes les personnes de bonne volonté à se rappeler que leur action, petite soit-elle, peut soulager la souffrance des milliers de personnes qu’on ne pourrait s’imaginer ».
Seul le mariage de l’amour et de la volonté permet de réaliser d’aussi grandes choses pour une humanité désemparée en quête de repères.

 

 

 

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